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publié par Sfar le 10/03/08
Sébastien Tellier
- Sexuality
Sexuality

Seb., Sex. & ...

Quand Sexuality est sorti, j’avais jeté une oreille rapide dessus en me disant de suite que « non, franchement non ! ». Une ambiance kitschissimme au possible, une voix énervante à souhait, des semblants de paroles... Pas vraiment un album que j’avais envie d’écouter et surtout de chroniquer sur Le cargo ! Les goûts et les couleurs, n’est ce pas ... Et puis déjà qu’on a peu de temps pour parler de tous ces albums fantastiques qui sortent, de tous ces artistes que personne ne connaît et qui mériteraient tant qu’on les écoute, il était hors de question de perdre de précieuses minutes pour faire une chronique qui forcément serait négative.

Et puis voilà, les jours passent et nous sommes gavés à la nausée d’articles et couvertures à la gloire du génie Tellier ! On nous parle de Sexuality on nous loue ce qui est sans aucun doute l’album de l’année, que ce soit sur les forums les plus underground ou dans la presse dite spécialisée. Il n’y en a plus que pour le chevelu barbu tellement tendance. Et l’effet de son Sexuality semble vraiment énorme : des filles se mettent à porter à leur partenaire des regards d’une intensité folle à l’écoute de cet album, des garçons trentenaires avouent avoir été émus aux larmes par les morceaux de Tellier. Il y a vraiment de quoi se remettre en question ! Nul n’a le monopole du bon goût, et puis on se dit qu’on est peut être passé à côté de quelque chose de grandiose en effet. Une telle unanimité autour d’un album et d’un artiste... Ce doit être sans doute une de ces œuvres tellement audacieuses dont on n’a pas su saisir le sens profond lors d’une écoute trop distraite.

Alors qu’à cela ne tienne, prenant mon courage à deux mains je me replonge donc en profondeur dans la Sexuality de Sébastien Tellier.

Hoooooooooo ... Mmmmmmmmmmmmummmm ... Haaaaaaa !

Comme l’artiste l’explique lui-même chacun de ses albums est conceptuel, il y a eu le premier sur la famille, puis un autre sur la politique et là voilà un thème universel qui ne peut que passionner les foules : la sexualité ! Entre les baiseurs effrénés, les mal baisés, les pas baisés du tout (chacun se situera où il veut) au moins Tellier est sûr de toucher un très vaste public. Sébastien a d’ailleurs souhaité par cet album s’ouvrir de plus en plus à son public et aller flirter vers les contrées attrayantes de la variété.

Parlons d’abord de la pochette ! Cette pochette, mais quelle pochette ! On en a connu des pochettes moches mais des moches comme ça, on s’en souviendra longtemps. Et puis mince, c’est un hommage à la femme ça ? Chacun sa vision de la femme me direz-vous, disons que j’ai du mal à voir cette pochette comme un vibrant hommage à la sensualité féminine !

Passons à l’écoute : on découvre l’album et on se rassure d’abord en se disant que tout ceci est une vaste plaisanterie, un disque potache un peu à la manière d’un Mickael Youn.

La musique est tellement .... Tellement .... Indéfinissable. Un peu comme si on avait voulu faire le disque « tue l’amour » par excellence (pour un album qui se veut une ode à la sexualité et la sensualité féminine c’est un comble). On écoute les morceaux défiler et on éprouve un sentiment étrange : l’impression que Sébastien Tellier serait le fruit de relations honteuses qu’auraient eu Richard Clayderman avec Jean Michel Jarre. Et contrairement aux mathématiques où le moins par le moins donnent un résultat positif, on sombre ici dans l’ultra négatif. Au moment du chant , une étrangeté supplémentaire : c’est l’esprit de Claude barzotti qui semble prendre possession de la voix de Tellier.

L’album débute par “Roche” : les souvenirs émouvants des vacances de Sebastien à Biarritz, ses premiers amours, ses premières expériences sexuelles, le soleil, la mer, la sensualité de peaux qui se touchent et se découvrent, la chaleur de l’été et tout et tout... à lire comme ça, ça pourrait presque être excitant, à écouter c’est carrément navrant ! il rêve de Biarritz en été sur fond d’un « tutututututututut » électro énervant, des paroles d’une niaiserie et d’un intérêt digne d’un ado boutonneux. Nous on rêve surtout de vite passer à la suite.

Et on est loin d’être déçu ! “Kilometer” entame la liste des morceaux où se mêlent râles, soupirs langoureux à ces sons kitschounets qu’on croyait à jamais oubliés ! Le sommet du genre étant atteint par le morceau “Pommes”. On n’en peut plus de ce morceaux : ce sont des oooooooooooooh, des ahhhhhhhhhhhhhh des ha ha ha haaaaaaaaaaa, des Mmmmmmmmmmmmmmummmmmmmmmm à n’en plus finir, tout cela sur fond de musique d’ascenseur. Quand Sebastien tellier dit adorer entendre ses chansons dans les supermarchés, on comprend tout le sens de cette phrase. Puisqu’on parle Sexuality autant faire marcher la machine à fantasmes avec ce morceau “Pommes”. A son écoute, la première chose qui me vient à l’esprit c’est Samantha en train se faire sauvagement **** au rayon primeurs entre des piles d’ananas et les cageots de bananes en provenance d’Afrique... pendant que Robert annonce dans son gros micro une promo sur les saucisses au rayon charcutaille. C’est dire la sensualité et la finesse qui émanent de l’écoute de ce titre. D’ailleurs rien d’étonnant de découvrir que les lignes de basse de ce morceau ont été écrites par Rico, le Rico qui réalisait en partie les bandes sons des films de Marc Dorcel.

Même pas la peine de vous parler de “Divine”, tant on va en bouffer à toutes les sauces dans les jours à venir. En effet, c’est Le morceau qui nous représentera à l’Eurovision, une sorte de beach boy tribute avec les râles de plaisir en moins. C’est festif, c’est joyeux, c’est très « gnangnan », c’est parfait pour l’eurovision !

Avec “une heure” on a frôlé le pire, Sébastien tellier déclare en effet : « C’est le premier morceau que j’ai écrit pour Sexuality. A la base, je voulais justement le faire durer une heure, avec la même ambiance sexuelle du début à la fin, que les gens puissent vraiment s’éclater dessus. ». Oh mon dieu ! Une heure de “Une heure” : je meurs ! Rien à ajouter sur ce titre qui ne dépareille pas avec le reste des morceaux précédents.

“ Fingers of Steel” et ses rythmes électro rappellent très vaguement jean Michel jarre et son Oxygen. Mais tout l’intérêt de ce titre réside dans sa genèse, il s’agit là d’une chanson évoquant l’un des fantasmes ultimes de tellier : faire l’amour avec un robot. Oui, car il faut savoir que bientôt nous ferons l’amour à des robots, des vrais et que d’ailleurs « les godes sont des bébés robots ». En voilà des choses intéressantes que nous apprend ce Darwin de l’évolution sexuelle. D’ailleurs, depuis que je sais que Sébastien a écrit ce morceau en s’imaginant « une main d’argent en train de caresser une énorme poitrine à peau de pèche ». je ne vois plus la vie cybernétique sous le même angle et j’ai d’un coup une envie folle de revoir Robocop sous tous les angles.

Pour finir sur ces quelques morceaux de Sexuality, n’omettons pas de parler de ce que Tellier considère lui-même comme « son troisième chef-d’œuvre, après Fantino et La Ritournelle. » : “L’amour Et La Violence”. Sans aller jusque là, reconnaissons qu’il s’agit sans doute du morceau le plus touchant de l’album. On démarre avec des accords de piano pour terminer dans une explosion « jarrienne », le tout sur une succession de rimes en « Ence » et en « Si ». Ce morceau est touchant parce qu’il est tout plein d’immaturité, de maladresses et semble être l’un des plus sincères de cet album.

Mais pourquoi est-elle si méchante ?

Sebastien Tellier serait donc un grand génie, le messie en passe de réinventer le paysage musical français. Cet homme est surtout un génie de la relation publique : il sait bénéficier d’un très bon réseau d’amis journalistes, d’une maison de disque qui sait vendre son artiste et a eu la « chance » d’être promu phénomène hype du moment. La consécration ultime résultant dans sa participation au concours Eurovision. Sébastien Tellier se rêve en Houellebecq de la chanson française. Sébastien Tellier tente une approche « kateriniste » du personnage décalé, iconoclaste, complexe et insaisissable. Sébastien Tellier s’imagine pouvoir surpasser un Christophe ou un Polnareff. Sébastien Tellier pue l’imposture à plein nez.

En fait de génie, Sébastien Tellier est un petit garçon qui serait resté au stade prépubère de ses premiers émois, un nostalgique des films erotico-porno-chic de ses jeunes années et de tous ces clichés qui font naître un semblant de désir et alimente des fantasmes de supermarché.

Il existe des régressions nécessaires et utiles à une meilleure évolution, mais là on touche au pire de ce qui a pu exister. Quel intérêt de ranimer toute cette médiocrité sans y ajouter un touche d’humour ou même tenter de relever un peu le tout par quelques subtilités modernes ? Un des membres de daft Punk a collaboré à tout ceci ? grand bien nous fasse ! Après une écoute intensive de Sexuality on a vraiment du mal à cerner l’apport d’une telle collaboration et cela rend la chose encore plus risible.

Et que dire des papiers dithyrambiques ci et là ? On se pince en lisant tout cela. Tellier dégage « l’érotisme classieux d’un gainsbourg », mais on croit rêver en découvrant ces phrases ! Là où, chez gainsbourg, les soupirs et les cris se font subtils et troublants, chez Tellier on se retient d’exploser de rire tellement on frise la grosse farce, la bande son de vidéos gag classées X.

Et tout cela énerve forcément car nous savons qu’il existe tant d’artistes authentiques et de talent qui n’auront jamais un dixième de la couverture médiatique qui est accordée à Mr Tellier.

Il est évident que je ne serai jamais, hélas (tant mieux ?) réceptive à ce Monsieur Tellier , à son Sexuality, à cette transe qu’il semble provoquer chez beaucoup. Et pourtant j’aurais tant aimé être celle qui pourrait écrire qu’ « être touchée par les mots d’une chanson en FRANçAIS avec du synthé derrière, depuis les “démons de minuit” ça ne m’était pas arrivée et ça n’a pas de prix »

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publié par le 10/03/08
Derniers commentaires
saintgroove - le 15/04/08 à 17:31
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Votre article est très bon mais en ce qui me concerne je prends tout ceci au second degré , n était ce pas le but ?
eh oui , 34 ans , ça doit etre pour ça ...le "revival" d’une jeunesse qui a détesté toute la variété Française avec synthé ou pas mais qui prend du plaisir à "délirer" sur Tellier qui je le crois nous amene un peu de fraicheur et de légèreté dans ce monde où la mort est plus présente dans les journaux télévisés que l’amour .....
keep cool ...tout ceci n’est que de la musique

Sfar - le 15/04/08 à 18:12
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le seul hic étant que je ne sois pas certaine que Tellier ou toute la sphère médiatico-bien pensante le prenne aussi au second degré...

Et malgré tout Je keep super cool , ne vous en faites pas.
merci beaucoup pour le commentaire, ça fait toujours plaisir d’avoir des retours, quels qu’ils soient sur ce qu’on écrit !

john - le 05/05/08 à 19:51
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J’ai bien aimé politics, rien de très original (c’est fou le nombre de "jeunes" artistes qui s’inspirent des 60’s/70’s alors que durant cette même période, peu se sont inspirés de la musique des 20’s ou 30’s), mais assez agréable à écouter et j’aime bien ce côté Zappa, Odeurs.
Ecouté quelques morceaux du nouvel album sur youtube, et cela ne m’a laissé aucun souvenir, une musique synthètique assez anodine, vaguement entraînante.
Le personnage est assez amusant, ses interviews plutôt interessantes (contrairement à tous les autres, anglo-saxons y compris (et j’ai de vieux rock&folk du début des 70’s donc j’en ai lu beaucoup), à part bien sûr Manset ou Nino Ferrer, il semble avoir quelque chose à dire, une certaine sensibilité).
Pas pour le défendre, et c’est très bien que certains n’apprécient pas, le considèrent comme une sorte d’imposteur, mais tant mieux si on en parle (il y a quand même bien pire et grâce à lui les plus jeunes peuvent s’interesser à Gainsbourg, Polnareff et bien d’autres).
Quant à la Pochette, j’aime bien, on dirait une couverture de Metal-Hurlant par Jeronaton.

julien - le 29/03/09 à 19:36
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Alor bonjour tout d’abord, je suis tombé par hasard sur cet article.
Je ne l’ai même pas lu en entier, les critiques de la musique "roche" on suffit a me convaincre de poster un commentaire.

Je ne suis pas du tout daccord avec toi.Je ne sais pas si tu as eu un passé douloureux avec sebastien tellier, mais tes critiques sont pour moi tout simplement scandaleuses. Sébastien tellier fait certainement parti des plus grands artistes jamais connus en France.
Son album sexuality est pour moi l’une des plus belle performance que j’ai ecoutée cette année, et il apporte un nouveau souffle que l’on attendait depuis très très lomptemps.

Honnetement, je crois qu’il est temps de réagir sur des articles comme celui-ci qui salissent des VRAIS artistes que l’on ésperait voir un jour, prenez votre esprit 2be3 poser le dans un placard et allez vous coucher avec de nouvelles resolutions pour qu’enfin en vous reveillant, la France refasse enfin de la VRAI musique.