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publié par gab le 25/09/14
Joe Chicago and the Supercherries
- Surfing cuties
Surfing cuties

Ce qui est bien avec un nom comme Joe Chicago and the Supercherries c’est qu’il est un monde à lui tout seul. On pourrait faire la moitié de la chronique sur ce nom seul et on retomberait a priori sur nos pieds (on ferait l’autre moitié sur la pochette du disque et la boucle serait bouclée). Car que ce soit pour Joe, Chicago ou ses Supercherries, c’est bien sûr l’état d’esprit qui compte ici, presque plus que la musique. Et d’ailleurs "Surfing cuties", le morceau éponyme, nous fait passer en quelques secondes de la circonspection (les grincements du violon d’ouverture) à la plénitude (le chant auquel on accroche d’entrée de jeu) pour aller se perdre dans les méandres d’une transe velvetienne en fin de morceau. Guère besoin en effet de voir plus loin que le nom du groupe pour imaginer une musique hybride, décalée, un second degré en filigrane et des moments hallucinatoires. Et en même temps ce serait dommage de s’arrêter là, hauts-les-cœurs (oui, on sait qu’on finira par se perdre dans ce disque), allons-y gaiment.

prémonitoire

Vous l’aurez compris, "Surfing cuties" est un manifeste à lui tout seul du haut de ses 8 minutes et on ne s’en lasse à aucun moment. On y traverse des forêts médiévales, on y croise des cavaliers slaves et on se laisse hypnotiser par l’étrange pouvoir de ce violon obsédant. Surfing cuties, l’album, nous apparait donc dans son morceau d’ouverture sous la forme d’un rêve. Un songe prémonitoire, à la fois inquiétant, intrigant et familier auquel on pourra heureusement se raccrocher par la suite lorsque Joe Chicago s’en ira titiller des contrées parfois hostiles à nos petites habitudes musicales. C’est que notre homme ne ménage pas sa peine entre pseudo-chorales (les elfes allemandes d’"Ein lied"), incantations malicieuses ("Starfish"), chants mystiques ("Death in Hawai") ou inquiétants/dérangeants ("Chant of Inamepoph", "Pigargue vocifère"), tout est là pour nous tenir sur nos gardes et stimuler nos sens. Et ça marche, peu de chances qu’on se laisse aller à somnoler dans ce maelström musical. Cependant, on ne se refait pas, on accrochera au final plus aux morceaux relativement conventionnels comme le joyeux "कलियुग (Kali Yuga)" et le plus classieux "Not just singing" (qui du chant aux paroles évoque en forget-me-not nos bienaimés Smiths).

non-retour

Ce disque avait tout pour nous perdre, pour nous repousser d’emblée, et au bout du compte on se surprend à parcourir ses allées toutes sauf conventionnelles même après la tombée de la nuit, dans les heures creuses et dangereuses ("Permission", "Bereit"). Seuls face à nos petites peurs trop humaines, le rêve touche à sa fin. On se découvre un peu perdus au cœur du labyrinthe ("Surfing cuties (final)"), on y restera bien jusqu’à la nuit prochaine, à faire la ronde avec nos amies allemandes qui repassaient dans le coin ("Auf der wiese") et à écouter les incantations ésotériques de morceaux plus ou moins cachés. De toute façon, arrivés à ce point de non-retour, le temps a cessé d’imprimer sa marque. Les jours et les nuits se succèdent à un rythme hasardeux et polyphonique. Prière de lancer une expédition de secours (en cordée, c’est plus sûr) si vous ne nous voyez pas réapparaître d’ici 48 à 72 heures ...

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publié par le 25/09/14