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publié par Sfar le 30/07/09
Garden Nef Party 2009 - [17/18/2009, 18/07/2009]
Garden Nef Party, 2009 — Les Valettes, Angoulême

Belle des champs

Démarrage un peu pluvieux pour cette troisième Garden Nef Party. Dans le cadre bucolique de la ferme des Valettes, au pied d’Angoulême, les festivaliers affluent, malgré les quelques gouttes qui tombent, vers ce site convivial à taille humaine. L’endroit est fort agréable, situé en contrebas de la ville. Au milieu de champs en partie arborés, on peut admirer la ville et ses remparts. Sur place les scènes sont, elles aussi, en contrebas, permettant d’avoir toujours une vue d’ensemble depuis quasiment tous les recoins de la ferme des Valettes. Un cadre quasi intimiste pour un festival où rien ne saurait nous échapper.

L’espace se veut résolument champêtre malgré les déploiements de matériels électriques et les deux scènes qui l’ont investi. Dans cette logique, le festival soigne tout autant sa programmation que son identité éco-festival. Entre gobelets et pichets consignables, toilettes sèches (à l’hygiène et l’utilisation discutables), les brigades vertes... tout a été mis en place pour respecter au maximum ce théâtre de verdure.

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Le festival débute dans des conditions météo incertaines. Après quelques mots d’accueil, Feromil prend place sur la gauche de la scène, masque à gaz sur le visage, détecteur de métaux en mains, notre homme produit un son tendu : sorte de larsen mélodique. Avant goût sauvage et rapide avant que ne débute la grosse programmation du festival.

La pluie tire-toi de notre herbe !

Sous un ciel capricieux, la jeune Izia entame la garden nef party cuvée 2009. La jeune fille déborde d’énergie et présente une motivation sans bornes, flirtant entre culot et prétention. Elle sait qu’elle peut se le permettre car elle débute certes mais pas en inconnue (c’est une fille de... si certains l’ignorent encore). Izia a de la voix, Izia est une rockeuse, une vraie, une énervée. Elle n’est pas de ces poupées barbies folkeuses un peu trop sages. Elle est sympa Izia : elle plaisante, ordonne à la pluie de se tirer de notre herbe et se met rapidement le public dans la poche. Elle chante en anglais, a de la puissance vocale, secoue ses cheveux dans tous les sens. Elle a tout d’une future grande mais a encore quelques efforts à faire. Semblant parfois singer ses illustres références (Janis Joplin ou Patti Smith) elle surjoue trop souvent. Le chant n’est pas toujours bien assuré. Défauts de jeunesse qui seront, sans doute, bien vite corrigés.

jeunisme

Un peu à l’image du temps, entre éclaircies et averses, les Stuck In The Sound arrivent et débutent en dents de scie la série de concerts de la Garden Stage. Avec Phoenix, qui joueront un peu plus tard au même endroit, le public vient de prendre un sacré coup de jeune. On s’approche du devant de scène, on ressent comme une gène tant la faune environnante semble plus proche du brevet des collèges que des années fac. Avant même qu’un indélicat nous appelle Maman mieux vaut fuir le c(h)oeur des jeunes fans pour observer de loin ce qui se passe sur scène. Public similaire pour ces deux groupes mais prestations bien différentes. Alors que Stuck in the sound tâtonne gentiment, Phoenix est nettement plus à l’aise et installé. Ne serait-ce qu’au niveau de la simple occupation scénique quand Phoenix s’impose, à la limite de la prestation archi-prétentieuse, envahissant d’emblée la scène, les Stuck... semblent bien timides, coincés dans une portion de scène. Malgré des morceaux qui manquent parfois de puissance sur disque, Stuck in the sound fédère son jeune public en live. Phoenix, quant à eux, transforment l’essai étranger ralliant à leur cause musicale un public hexagonal pour un soir angoumoisin.

les belles surprises de Valettes Stage

Entre temps sur la petite scène de bien sympathiques découvertes se succèdent. D’abord le duo fraternel Joe Gideon & The Shark. Lui, sobre moustachu à la guitare, elle, tenue panthère à la batterie, nous racontent des histoires sur des musiques bluesy rock. Le set est excellent, la voix de Gideon est envoûtante et s’accompagne idéalement de la rythmique entêtante de The Shark.

Un peu plus tard dans la soirée, cette même Valette scène accueille Sleepy Sun : six énergumènes de Santa Cruz. On les imagine à tord comme de joyeux hippies illuminés rigolos. On s’attend à une prestation gentillette tendance très folk psyché. Que nenni ! Ce qu’on nous présente est bien plus rock que folk accompagné d’un chant péchu et convaincant. Voici un groupe que beaucoup ne manqueront pas de revoir lors de leurs prochaines venues françaises.

les attendus qui n’ont pas déçu

Pour ce premier jour du festival, beaucoup espéraient de la part des belges de Ghinzu, une bien meilleure prestation que leurs regrettables premiers concerts de la tournée française dont un passage à la Laiterie de sombre mémoire. Plus à l’aise avec leurs nouveaux morceaux, dorénavant bien rodés, le groupe assure et propose un set nettement plus audacieux et travaillé. On retiendra surtout une version complètement hallucinante de “The Drugster Waves” aux variations finales électro-expérimentales.

Sur cette même Garden Scene viendront en tête d’affiche du festival les écossais Franz Ferdinand. Menés par leur dandy chanteur Alex Kapranos, les quatre garçons dynamisent la soirée et apportent la chaleur qui, dans la nuit charentaise, fait défaut. Franz Ferdinand ne déçoivent jamais en concert et ce soir c’est bel et bien encore le cas. Que ce soit avec les nouveaux titres de leur dernier opus Tonight ou avec des morceaux nettement plus connus, le public est conquis dès les premières mesures. Alex Kaprano est taquin et adorable quand il s’exprime dans un français qu’il a apparemment bien potassé. Sympa, morceaux excellents, interprétation époustouflante, la tête d’affiche ne déçoit pas et les groupes qui suivront devront faire avec une barre placée bien haut en ce milieu de soirée.

Ainsi s’achève le premier jour

Après les écossais énervés, le rock des Blood Red Shoes nous semble du coup bien fade et peu convaincant. On écoute plus par politesse et acquis de conscience que par pur plaisir. On ne saurait dire si la prestation est véritablement mauvaise mais comparée à ce que nous ont offert les écossais quelques minutes avant, ça ne le fait décidément pas. Les fanatiques de Jon Spencer veilleront tard et traverseront courageusement une prestation interminable de Vitalic pour apprécier Boss Hog, formation parallèle de Monsieur Blues Explosion. La météo aura été clémente en cette première journée de la Garden Nef Party accompagnant un début de festival déjà bien apprécié par l’ensemble du public.

les copains d’abord

Cette seconde journée, beaucoup plus humide, propose aussi son lot de découvertes ou confirmations musicales. Après avoir pris nos marques lors du premier jour, nous avons grand plaisir à retrouver un site toujours aussi impeccable (Bravo la brigade verte) et l’ensemble des stands de nourriture fort attrayants : outre les incontournables sandwichs, crêpes, kebabs ou produits du terroir (gros succès d’un sandwich local appelé le foué), on trouve des étals de fruits et légumes de qualité qui font le bonheur de tous les frugivores du festival.

Mais revenons-en à la musique. En parallèle des amitiés qui se lient au sein des festivaliers, c’est aussi sur scène que nous avons plaisir à retrouver quelques proches connaissances. Angoulême accueille ainsi deux des siens devenus londoniens depuis quelques années : l’incroyable duo John & Jehn : espoir de la scène rock indépendante. On apprécie leur belle présence et un rock efficace sur pas mal de titres. Voici des expatriés à suivre de près.

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Quelques heures plus tard, la même scène reçoit Zone Libre que nous suivons depuis toujours sur Le Cargo. Le groupe devenu collectif se produit dans le cadre de l’album L’angle mort. Il s’agit là de la tournée Hamé, Casey & Zone Libre. Sauf que, depuis le début de l’été, des raisons personnelles (dixit Serge Teyssot Gay) ont amené Hamé de La Rumeur à quitter la formation. C’est un ami de Casey, B James du collectif Anfalsh, qui reprend son rôle sur scène. Une nouvelle fois, le groupe porté par la verve et les élans magnifiques de Casey se transcende. Serge Teyssot Gay virevolte toujours autant dans les airs, Marc Sens semble bien mieux impliqué et intégré au reste du groupe que lors de la prestation strasbourgeoise. Cyril Bilbeaud assène une rythmique toujours aussi impeccable à l’image de sa classe vestimentaire. B James reprend avec brio les passages naguère portés par Hamé. Belle osmose sur scène pour un concert qui semble un peu OVNI par rapport aux autres types de formations proposées cette année. L’accueil est des plus chaleureux et amplement mérité.

Ceux qui confirment

La belle découverte scénique de la RdR 2008, The Ting Tings tourne énormément depuis plus d’un an avec son album We Started Nothing. Les voilà sur la grande scène du festival, Katie, papier aide mémoire à la main, pour nous lire dans un français maladroit mais adorable quelques paroles chaleureuses sur son plaisir d’être là ce soir. Avec toujours la même allégresse communicative et un soupçon de candeur, le duo emporte le public de la Nef Party dans un set réjouissant où se succèdent tous leurs titres sympathiques comblant ainsi même les plus rabat-joie.

Dans un registre nettement supérieur (musicalement s’entend) les membres de TV On The Radio investissent brillamment Valettes Stage dans la nuit. Le groupe du multiproducteur David Sitek impressionne toujours autant par le carré de ses interprétations et l’extrême qualité des titres qu’il propose. Les expérimentations subtiles et montées en puissance feront vite oublier le retour de la pluie sur le site. Set impeccable pour un groupe dont il est difficile de ne pas apprécier chacune de ses prestations live.

ceux qui déçoivent

Cold War Kids avaient fait aussi forte impression lors de leurs concerts passés, l’attente était donc au rdv. Nous avions le souvenir d’une prestation de grande classe à la route du rock. A la Garden Nef Party , ce sera au niveau de leur laisser-aller vestimentaire : surprenant et décevant. Fatigue ou lassitude ? Cold War Kids enchainent leurs morceaux de manière bien trop plate alors qu’ils sont capables de tellement mieux.

Les inattendus

Annonce est faite que, suite à une extinction de voix, la chanteuse black américaine Santigold annule sa prestation. En heure et place de la demoiselle, deux de ses compatriotes prennent place plus tôt que prévu. Mix Master Mika, Dj officiel des Beastie Boys et l’human beat box Rahzel. Impressionnante alchimie entre un génie des platines et ce fameux percussionniste vocal. Succession de morceaux hip hop et groove qui emballent un public d’amateurs et de curieux du genre. En point d’orgue le duo proposera un toujours efficace mixage de “Killing In The Name Of” de RATM ainsi que des sampled extraits comme c’est étonnant !!! de morceaux des Beastie Boys.

So Gossip

Attraction de la soirée, beaucoup attendait de voir sur scène le phénomène Gossip et son emblématique chanteuse Beth Ditto. Une présence incontournable à la fois en unes de magazines rock, que dans la presse féminine, égérie des rondes, des lesbiennes, créatrice de mode, chanteuse à coffre, Beth est partout en ces temps de crise. Au delà de la chanteuse, il s’agit carrément du décomplexe personnifié qui va s’offrir à nous. Et pour le coup nous sommes servis ! Habitués aux excentricités vestimentaires les plus folles, voilà Beth qui dépasse une nouvelle fois les limites du bon goût : une robe mémère absolument pas adaptée à sa morphologie et qui devient une véritable contre-pub à la ligne de vêtements que s’apprête à lancer la dame. Si l’on ajoute à cela sa nouvelle coiffure qui fait führer aux dires de certains photographes, on imagine rapidement la stupéfaction du public à l’arrivée des Gossip sur scène. Sur des morceaux pop rock électro, Beth Ditto se déchaine physiquement et vocalement. L’ensemble reste convenable même si on pourrait espérer qu’à l’avenir les Gossip se montrent plus audacieux dans l’écriture des morceaux à venir que pourraient interpréter l’étonnante Ditto.

C’est avec le set de Monsieur French Touch : Etienne de Crecy que s’achève cette troisième et fort réussie édition de la Garden Nef Party. Cette édition 2009 fut une belle réussite pour ce festival à taille humaine. De grands noms auraient été approchés pour rejoindre le conseil d’administration de la Garden Nef, voilà de quoi attendre impatiemment une édition 2010 qui saura à coup sûr proposer une programmation tout aussi efficace.

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publié par le 30/07/09