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publié par tairanteuh le 17/02/04
dominique a
- tout sera comme avant
tout sera comme avant

étiquette

trop longtemps dominique a a été présenté comme le héraut de la nouvelle chanson française. une étiquette réductrice - comme toute étiquette il est vrai - mais surtout incomplète pour cet artiste aux multiples facettes. au fil des albums, en une décennie, on s’est plus ou moins familiarisé avec ce personnage discret. par les médias qui l’ont progressivement remarqué, lui consacrant toujours plus de temps et d’espace. par sa volonté de casser cette image collée dès ses débuts. ce n’est véritablement que depuis remué en 1999 que le français a quitté la confidentialité. et lithium pour labels. de nouveaux moyens, une nouvelle échelle pour cet acteur aventureux du paysage culturel français.

contemplatif

des disques sans cesse plus audacieux et de véritables performances sur scène où seul et avec une rare dextérité il pioche dans son élégant répertoire, revisité avec son boîtier de chez line 6 comme joseph arthur. des textes qui refusent le purement contemplatif ou la succession de jolies tournures de phrase, figures de styles. l’écriture est chose importante et passionnante chez dominique a. ainsi a-t-il attribué chaque titre de son dernier album à un écrivain, lui demandant une réaction à ces quelques mots, sans lui laisser écouter le morceau. quelle littérature peut découler de "mira", "l’inuktitut" ou "dobranoc" ? il faudra lire le recueil qui accompagne l’édition limitée de tout sera comme avant pour le savoir.

actuelles

enfin, la musique. catalogué au départ dans la chanson française minimaliste, dominique a s’est appliqué régulièrement à faire mentir l’emballage. plus exotique aux côtés de calexico, moins conventionnel en compagnie de françoiz breut, moins sage et retenu comme otage d’oslo telescopic et moins minimaliste sous la houlette de john parish. et puis grâce à commentcertainsvivent.com, formidable site non-officiel de l’artiste, on a pu avoir les impressions directes (coups de cœur comme coups de gueule) et découvrir un homme très à l’écoute des musiques actuelles, résolument tourné vers son époque.

eaux troubles

pas étonnant de la part de cet auditeur averti et éclairé de le voir convier ici le collectif gekko (jean lamoot épaulé de jean-louis solans et arno devos) avec lequel alain bashung a signé le plus bel album francophone depuis des lustres. et le plus inventif et audacieux. et le plus travaillé et abouti. certainement trop mûr pour séduire la masse. l’imprudence n’est restée qu’un succès d’estime. tout sera comme avant n’est cependant pas une réplique de l’imprudence. les comparaisons s’arrêtent à l’équipe qui supervise, à cette même chanson française diluée dans les eaux troubles de l’expérimentation sonore puis baignée dans des harmonies à la richesse insoupçonnée. puis au fait que les deux albums sont assurément de la même trempe.

souffle

le collectif s’empare des démos élaborées par dominique a et leur donne une toute autre vie en compagnie de musiciens d’horizons différents : christine ott et l’orchestre symphonique de bulgarie pour les somptueux arrangements, simon edwards (de talk talk) à la basse et martyn baker à la batterie, tous deux déjà présents sur l’imprudence. un souffle nouveau et inédit dans l’univers sans balises fixes de dominique a, l’ensemble prenant une cohérence jamais atteinte auparavant. le regard neuf d’éléments étrangers a permis d’agencer les idées de l’artiste à la perfection. dominique a ne susurre plus ses textes justes, profonds et bouleversants. il les chante vraiment et mieux que jamais. avec une intensité dont on le savait capable depuis "pour la peau" sur auguri. libéré de ne plus être l’acteur principal du disque, dominique a peut s’abandonner totalement, épouser de sa voix magistrale toutes les profondeurs données par l’instrumentation riche. la musicalité des mots, le placement de la voix, l’intonation... le texte se fond parfaitement dans la musique, de la plus douce des manières.

fil

une telle réussite ne vient pas seulement du travail des musiciens ni même de dominique a qui a proposé le matériau rendant possible l’érection d’une telle architecture. c’est l’osmose au sein de l’équipe, chaque idée trouvant écho chez l’autre pour la rendre meilleure, la poser au mieux dans l’édifice somptueux qu’est tout sera comme avant. comme sur l’imprudence, l’écoute ne progresse plus en terme de morceau dont on s’approprie la structure, de mélodie dont on s’imprègne, d’un texte que l’on imprime... il ne reste qu’un ensemble dans lequel on s’abîme, que l’on pénètre avec une facilité déconcertante et que l’on ne quitte qu’à regret. à la fois amusé et sérieux, le récit habité de dominique a, comme seul fil conducteur, captive comme par le passé. rien (ou si peu) n’a changé.

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publié par le 17/02/04