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publié par Renaud Alouche le 09/02/17
Cairobi
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Cairobi

Alors que les groupes de pop-rock psychédélique continuent de fleurir dans le paysage musical, l’utilisation excessive du phaser et les voix pitchées font malheureusement converger la majorité de ces projets dans un même panier quelque peu mainstream. Mais l’inspiration ne s’est pas totalement tarie, il reste des formations comme Cairobi, capables d’injecter du sang neuf au malade, de renouveller les couleurs de l’arc-en-ciel avec les influences variées de son effectif regroupant pas moins de quatre nationalités différentes.

Ici et surtout ailleurs

Si c’est à Londres en 2008 que l’histoire de Cairobi commence , il serait réducteur de limiter la provenance du groupe à cette seule ville.

Il y a d’abord Rome Giorgio Poti, le chanteur, et Alessandro Marrosu, le bassiste se rencontrent sur les bancs de la fac. Leurs influences musicales les rapprochent rapidement, avec d’un côté des sonorités africaines et latines, de l’autre la musique expérimentale de Can, Lee « Scratch Perry » ou encore The Flaming Lips.

Puis vient la capitale anglaise et le duo devient trio avec l’arrivée du mexicain Salvador Garza aux claviers. Avec lui c’est la musique latine qui s’ajoute aux influences déjà variées de la formation. Peu après c’est au tour de l’autrichien Stefan Miksch (banjo et guitare) et du batteur anglais Joe White de rejoindre le projet. Le quintet prend le nom de Vadoinmessico et sort l’album Archaeology of the Future(2012) qui sera plutôt bien reçu dans la sphère indé.

Mais une autre rencontre qui va propulser les musiciens sur une nouvelle trajectoire : le français Aurélien Bernard vient remplacer le batteur Joe White. Avec lui, le groupe fait sa mue, le son devient plus électrique, plus puissant et se choisit un patronyme qui marque ce changement (et qui est plus simple à prononcer !)

Faire la synthèse

Avec ses origines variées, le groupe se retrouve face à certaines difficultés, la première étant la barrière de la langue, résolue par le langage de la musique, c’est en jouant que les cinq membres parviennent à se comprendre dans les premiers temps. Vient ensuite le challenge de faire coexister leurs univers variés dans un seul enregistrement homogène. Ce sera un EP quatre titres nommé  Distant Fire, sorti en 2014.

Cette autoproduction est marquée par son caractère apatride, écrit à Berlin, il est enregistré entre Rome, Londres et New-York par deux Italiens, un français et un mexicain, de quoi nous rappeler au bon souvenir de Gong.

La bonne réception du disque par les critiques se traduira avec une tournée des festivals réussie en 2015, permettant à Cairobi d’effectuer de nombreuses dates européennes et même américaines, après avoir écumé nombre de pubs londoniens à leurs débuts.

Avec un disque riche en couleur respirant une pop dynamique et chaleureuse, le groupe touche un public large, tout en conservant l’univers qui leur est propre, comme on peut le voir sur le clip de « Zoraide ».

Des mots osseux, des fantômes et une voiture

2017 marque une étape importante pour Cairobi. Avec la sortie de leur premier album, les londoniens entendent bien confirmer leur statut de groupe « World Music 2.0 » et conquérir les oreilles d’une audience plus large encore.

Au programme de l’album qui porte simplement le nom du groupe, 10 chansons. Sur la pochette, une photo au flash de quatre crapauds avec de gros ronds rose fuschia à la place des yeux, dérangés au milieu de leurs activités nocturnes, l’ambiance est vite posée.

L’ouverture se déroule en douceur avec « Habitat », une introduction instrumentale qui laisse rapidement place à une rythmique basse-batterie bien rodée. « Gristly Words », littéralement « mots remplis de cartilage », comporte tous les ingrédients magiques du groupe, à savoir une trame basse-batterie entrainante, avec quelques sonorités latines, des riffs de guitare qui s’envolent, accompagnant la voix de Giorgio Poti dans un voyage aux couleurs chatoyantes.

« Lupo » , le quatrième morceau de l’album, a été écrit en 2009 par Giorgio en pensant aux sorties en voiture avec sa petite amie, d’où le choix du nom (c’est un modèle de Volkswagen). C’est aussi le morceau le plus long de l’opus, sa structure très travaillée nous offre deux visions, avec d’un côté un groove exotique, très rythmé, et d’un autre le côté aérien du refrain, emplissant le spectre audio de vagues d’innocence.

Dans un registre plus sombre, « From Some Other Planet’s Sky » nous propose une balade galactique, et complète à merveille l’album avec ses solos de guitare à la reverb caverneuse.

« No Better Ending » conclut avec une mélodie envoutante et aérienne ces 35 minutes de voyage où la multitude d’influences et la variété des sonorités ne nuisent jamais à la cohérence de l’ensemble.

Difficile de ne pas être enthousiaste après l’écoute de ce premier album de Cairobi. Il délivre un message rempli de fraîcheur, déploit toute une palette de couleurs musicales qui rend la concurrence encore plus terne. Il ne fait aucun doute que toute cette richesse est le résultat du métissage des influences de ces musiciens aux origines variées. Cette originalité salvatrice dans un genre qui piétine nous pousse à leur pardonner sans problème les courts moments où l’enthousiasme retombe un peu à l’écoute du disque. Le projet est encore jeune et gageons qu’avec l’expérience, ils sauront nous proposer encore mieux.

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publié par le 09/02/17
Informations

Sortie : 2017
Label : Week of Wonders / Some Other Planet Records