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publié par Sfar le 05/09/09
Art Brut
- Art Brut Vs. Satan
Art Brut Vs. Satan

Trions les fonds de poubelles

Nous vivons une drôle d’époque quand même. Celle où la génération kleenex a éjecté la déjà peu recommandable génération zapping. La curiosité est une bien belle qualité mais désormais, avec l’abondance de nouveautés et d’informations en tout genre, nous nous retrouvons trop souvent à devoir vite jeter et oublier ce que l’on vient tout juste de découvrir. Les dommages collatéraux sont colossaux quand, moi la première, nous sommes toujours en quête de ce que l’on écoutera dans trois mois ou que les chroniques de disques (que les pauvres mortels auront en leur possession dans seulement un ou deux mois) pullulent sur les forums et blogs musicaux. Un album, pour plaire et survivre, devra être exceptionnel. Il n’y a plus de place pour les médiocres, ni même pour les bons crus et encore moins pour les albums plus particuliers nécessitant des écoutes répétitives ou une imprégnation profonde.

Mais voilà qu’au détour d’un concert prévu dans le cadre du festival Ososphère de Strasbourg me vient cette idée folle de réécouter le dernier album d’Art Brut. Art Brut vs Satan : cette vieillerie datant du printemps dernier. Et puis tiens pourquoi ne pas faire dans la régression et carrément chroniquer un album qui ne sortira pas dans une semaine ou un mois mais qui est déjà en vente depuis 5 bons mois !

Je me souviens qu’en Avril et même avant, lorsque cet album s’écoutait déjà par des moyens que la loi réprouve, il ne m’avait pas marqué tant que cela. J’avais surtout en tête leur ancien hit “Emily Kane” , un premier album Bang Bang Rock & Roll complètement jouissif et un deuxième opus It’s A Bit Complicated, un peu moins enthousiasmant. De surcroit les premières écoutes d’Art Brut vs Satan laissaient une impression de scepticisme intense. Quand en plus on lisait ça et là que cet album n’était qu’une resucée des premiers hits, que l’essoufflement gagnait au fur et à mesure de l’écoute, que la comparaison avec le Maxïmo Park laissait Art Brut sur le carreau complètement Ko. Conclusion : zéro intérêt et dans la foulée envoi des mp3 à la corbeille. Pas de sentimentalisme chez le chasseur de disque.

Grossière erreur que ce rejet bien trop précipité. Voilà que de nouvelles écoutes, nettement plus sérieuses et intéressées (concert à venir oblige) offrent un nouveau regard sur un Art Brut vs Satan très récréatif. A se demander s’il ne s’agirait pas là d’un des albums les plus réjouissants que nous ait offert 2009.

Les glandeurs déglingos

Ce qui est fort sympathique avec le groupe d’Eddie Argos c’est d’avoir à faire à de sacrés glandeurs ou apparents glandeurs. Cela rassure le fainéant qui sommeille en chacun de nous. Et d’ailleurs la fainéantise est une qualité énorme (mais chut à ne pas répéter aux plus jeunes) car elle pousse à aller vers l’essentiel et à réduire les efforts pour une efficacité maximale. Art Brut a fait appel à l’un de nos plus gros glandeurs pour produire son album : Frank Black. Celui-même qui fit les Pixies et qui, sous couvert d’une actualité toujours florissante en solo ou en formations diverses, n’en fout pas une rame en matière d’innovation ou de révolution artistique (Il vaut mieux d’ailleurs car les rares fois où il s’est aventuré dans du complètement différent ce fut une catastrophe musicale.). Eddie Argos, qui sait retenir les informations essentielles, a ainsi confié : « J’adore le premier Frank Black And The Catholics. Il l’a enregistré en un jour. Ça m’a fait réfléchir - c’est comme ça que je veux que les disques soient faits. » Tu m’étonnes ! Et je suis sûre que si les disques pouvaient être déjà prêts avant même que le groupe ne mette les pieds en studio ce serait le paradis sur Terre. Il n’en fallait pas plus pour motiver un Frank Black. Ce dernier a alors la brillante idée de suggérer au groupe d’enregistrer les morceaux de manière brute et sans fioritures en mettant en avant le son primitif de l’enregistrement live. Ainsi deux semaines seulement furent nécessaires pour obtenir Art Brut vs. Satan. Les moqueries et la mauvaise foi mises de côté, il convient de constater que le résultat en est fort réussi. Cela peut paraître déconcertant mais en fait non. Ce côté brut, presque mal travaillé sied tellement bien à l’esprit du groupe. Car ne l’oublions pas Art Brut est à l’image de son chanteur : un groupe de barges.

Le plaisir intense dans l’écoute de morceaux d’Art Brut ne réside pas dans ce timbre et ce phrasé tellement étonnants (dans le sens mais comment qu’il a fait lui pour qu’un jour on lui propose d’être le chanteur du groupe ?!?) mais dans ce qui est chanté. Ce n’est pas si souvent qu’on se marre autant en écoutant des paroles sur des morceaux qui musicalement plaisent tout autant. C’est déjanté comme on aime, complètement surréaliste, on y parle de tout et n’importe quoi. Les textes ne manquent pas de références aux grands ainés que ce soit le morceau The Replacements ou pour évoquer les Beattles, les Rolling Stones, Brian Eno ou U2.

Alors voilà comment un album qui avait fini en quelques jours au fond d’une corbeille virtuelle est capable de renaître de ses cendres et de se révéler sous un jour nouveau. En espérant que l’allégresse accompagnant son écoute soit tout autant efficace lors des passages en live.

Art Brut jouera le 25/09/2009 lors du festival de l’Ososphère de Strasbourg

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publié par le 05/09/09
Informations

Sortie : 2009
Label : Cooking Vinyl